L’association entre texte et image procède sûrement d’une des formes les plus archaïques de l’art. Les peintures d’un site comme la grotte Chauvet en France ont une dimension à la fois picturale et signifiante : elles figurent des animaux mais elles évoquent un sens que nous ne pouvons plus saisir pleinement, une intention de la part de l’artiste, au-delà des images. La sémiotique permet de mieux approcher ce sens qui néanmoins résiste à son dévoilement. TEXTE + IMAGE. Les peintres de la modernité tels Braque et Picasso, dans leur période cubiste, ont approché les mêmes contrées intellectuelles avec les moyens de leur temps – collage, papier journal, lettres au pochoir. On pourrait dire qu’ils ont ouvert un espace spirituel, un nouvel univers artistique. Leur projet rappelle celui de Mallarmé, ou de Marinetti. Après eux, d’autres sont venus, Apollinaire, Schwitters et Lissitzky. TEXTE = IMAGE. Au même moment, un ensemble d’écrivains inventait à neuf une façon de voir le monde. Aujourd’hui nous tenons leurs créations pour acquises. Elles sont devenues une seconde nature. Nous vivons dans la nouvelle ère néolithique qu’ils ont créée. Chose étrange, les procédés anciens ont contribué à élaborer une méthode de pensée inédite : ces oeuvres constituent une sorte de nourriture mentale, une obsession intellectuelle.
Extrait du texte d’introduction de Jeremy Adler