Divers mouvements artistiques apparus au début du XXe siècle ont entamé l’abolition de certaines frontières qui existaient jadis entre les perceptions d’expressions artistiques différentes. Ainsi, il est devenu fréquent d’avoir recours à plusieurs disciplines pour la réalisation d’une seule œuvre.
Dans les peintures cubistes par exemple, l’écriture entre souvent dans la composition de l’oeuvre. Afin d’insérer ce signe verbal parmi les éléments figuratifs et dans la recherche d’une vision simultanée des composants, les artistes adhérents à cette quête ont créé sur la surface plane de la toile un espace particulier où cela pouvait s’opérer.
Les œuvres réunies dans cette exposition, où l’image et le mot se côtoient, présentent elles aussi un espace singulier où ces deux éléments peuvent interagir. Dans ces œuvres, les rapports conventionnels entre perception et lecture sont bousculés et un espace « topographique* » est créé. Un espace dans lequel l’écriture est coupée de son rôle purement verbal et expérimentée en tant que phénomène à la fois verbal et visuel.
Le rapport entretenu entre l’image et le mot dans les œuvres ici présentées n’est pas hiérarchique. Les composantes linguistique et visuelle sont réunies tant dans le temps que dans l’espace. L’image et le mot jouent de la même force pour susciter chez le spectateur un imaginaire. Ils sont étroitement liés et ne sont séparés l’un de l’autre que de manière minimale, chacun parfois étant transféré dans le domaine habituel de l’autre, absorbé ou mêlé à celui-ci pour atteindre une nouvelle dimension.
* Le terme « topographique » est utilisé dans ce contexte dans J.D. Bolter, Writing Space. The Computer, Hypertext and the History of Writing, Hillsdale (NJ), 1991, p. 25, in Simon Morley, L’art, les mots, Hazan, 2004.